Depuis une année jour pour jour, on n’entend parler que de ça: en ligne. Je cible: formations en ligne. Mes cours et formations fondant comme neige au soleil par l’arrivée du Covid, j’ai dû faire preuve d’une réactivité olympique. À l’annonce du premier lockdown, en trois jours, une structure performante était à disposition de mes élèves. Personne n’a perdu le pas, le fil et l’envie grâce à la formation en ligne. Mais dès que les vannes se sont ouvertes à nouveau je suis descendu dans la rue avec mes apprenants, j’ai ouvert les salles de cours et regardées dans les yeux des personnes envieuses d’apprendre. C’était vital pour moi et sans forcément qu’ils le sachent, pour eux aussi.
Se déplacer dans un lieu donné, prévu et équipé comme il se doit, varier les supports, s’adapter à la présence d’autres élèves et faire leur connaissance. Mesurer les affinités, échanger avant la formation, durant une pause, jouer les tiers-temps en s’invitant pour un sacrosaint apéritif même assis sur un banc. Ce sont quelques-uns des atouts et la plus-value invisible, mais essentielle d’une formation. N’oublions jamais qu’une formation c’est l’interaction, ne pas se nourrir uniquement d’un enseignant, car chaque participant est formateur. On grandit par le point de vue du reste du groupe, par les retours d’expérience, par la richesse d’un ensemble jamais trop petit, mais surtout pas démesuré. Laissons les foules aux gourous et aux despotes. Les assemblées empêchent les gens de s’exprimer, l’intimité du groupe crée la confiance. Le présentiel pousse l’enseignant dans ses limites et même dans la difficulté et la provocation de son esprit (auto)critique. L’humain est de chaire et pas de pixels et c’est face à sa propre matière qu’il retrouve sa nature.
En présentiel l’élève ne peut pas se cacher, consommer sa bière, couper sa caméra pour masquer son pyjama. S’absenter à tout bout de champ pour grignoter, pendre une lessive, répondre à un mail, finaliser un achat en un clic, etc. Tous ceux qui ont participé à une formation en ligne connaissent ces déviances qu’on nomme commodités. L’apprentissage passe par l’engagement, le présentiel est son pourvoyeur.
La formation en ligne ne doit jamais remplacer la formation en présentiel. Elle doit rester à sa place de solution alternative et méfions-nous du contraire. Ceux qui jurent qu’une formation en ligne est aussi approfondie qu’une formation en présentiel, mentent ou manquent du recul d’expérience nécessaire. Et j’en appelle même à la mauvaise foi à but facilement lucratif et à la paresse. Allez pousser les portes des salles de cours dès que possible, que les enseignants s’engagent avant que la balance ne bascule trop et sans possibilités de retour, vers un apprentissage sans «entre les lignes».
Gabriele Chirienti